[Forum] Re: [FACIL] [Brevets] Réflexions de Marc Lavallée sur les brevets (long)
Marc Lavallée
marc at hacklava.net
Lun 17 Mai 00:23:44 EDT 2004
-----BEGIN PGP SIGNED MESSAGE-----
Hash: SHA1
Le 16 Mai 2004 19:35, Hans Deragon a écrit :
> "Ce dernier est au moins à égalité, sinon en avance sur le plan de
> l'innovation". Faux, faux, faux. C'est généraliser de quoi qui ne peut
> pas être généralisé. Il y a des LL qui sont supérieurs à ce que l'on
> retrouve dans le propriétaire, mais il y a du propriétaire qui est
> supérieur à du LL. Ça dépend de la catégorie du logiciel.
Si on prend la moyenne de ce que tu écrit là, ça équivaut à ce que j'ai
écrit; j'ai préféré l'exprimer de manière généralisé. On est d'accord.
Sauf que...
Un logiciel libre est vastement supérieur à son équivalent propriétaire,
surtout si toutes les fonctionnalités nécessaires sont présentes ou
qu'elles peuvent s'y rajouter . Étant donné l'offre impressionnante de
logiciels libres, je ne vois aujourd'hui aucune raison de s'acharner à
travailler avec des logiciels propriétaires, sauf dans les cas de force
majeure et de lock-ins, ce qui devrait être temporaire s'il n'y a pas
d'empêchements comme des brevets logiciels.
Reconnaître la supérioté des logiciels libres, c'est être optimiste. Si les
brevets logiciels affaiblissaient nos logiciels libres, il serait beaucoup
plus difficile d'en faire la promotion: si OpenOffice devait retirer les
trois-quarts de ses fonctionnalités et sa compatibilité avec les formats de
Microsoft, perdrais-t-on notre temps à envoyer des rapports de bogues?
> Revirement cette semaine, l'Allemagne s'oppose. Il y a de l'espoir.
>
> http://arstechnica.com/news/posts/1084553492.html
Ah ben là, si l'Allemagne s'oppose, ça change tout! ;-)
Sérieusement, dans l'optique où le but est de créer un système international
de brevets, le poids de l'Allemagne est relatif; le gouvernement français
aussi s'y oppose, en principe... On saura cette semaine si le parlement
européen a de l'influence sur la commission européenne, et la véritable
raison de cette Europe unifiée. Europe et États-Unis: même combat ($)? Le
seul véritable espoir, c'est que l'Europe a une autre tradition que les
États-Unis, et j'ose croire que même si les brevets logiciels étaient
imposés en Europe, il y aurait là beaucoup moins d'excès qu'aux États-Unis.
Mais le problème resterait entier puisque l'excès provient de l'idée même
d'attribuer des brevets illimités. C'est de la folie.
> Non. Je ne suis pas d'accord. Le but du FACiL n'est pas de promouvoir
> les LL coûte que coûte.
C'est quoi alors? Serait-ce de promouvoir les logiciels un petit peu libres
et pas trop propriétaires? "FACIL, pour l'aplat-ventrisme centre-molliste
de l'informatique linux-québécoise"? ;)
> Je ne suis pas convaincu que l'abolition totale des brevets seraient
> nécessairement bon pour la société.
La société ne s'en porterait que mieux. Les propriétaires un peu moins. On
ne peut pas tout avoir: une société libre refuse d'être contrôlée par des
monopoles. Évidemment, si demain tous les brevets terminaient d'un seul
coup, ce serait la débâcle sur les marchées financiers, les suicides
collectifs dans les rangs de la mafia, et autres horreurs ordinaires... 8-0
> Peut-être l'innovation (la vraie) a besoin d'un petit coût de pousse.
Accoucher de la (vraie) innovation, ça doit faire mal! :-)
> Je suggère une approche étapiste qui consiste à réduire la durée des
> brevets et étudier l'impact au fur et à mesure. Une baisse de la durée à
> 5 années, puis on étudie l'impact et on révalue.
Le contexte n'est pas favorable à cette forme d'itération, parce que les
intérêts économiques sont immenses. Tout est une question d'échelle.
> Pour les gouvernements, les autorités. Pour qui d'autres? C'est quoi le
> but de discuter des brevets, si ce n'est pas pour changer les politiques
> des gouvernements sur le sujet?
C'est que tes "propositions" ont un ton très officiel.
Moi je croyais que FACIL devait surtout parler au "vrai monde", pour leur
secouer les puces, de manière à ce que le poids politique des logiciels
libres deviennent plus important, en s'appuyant d'abord sur la conscience
citoyenne. Le mieux que peut faire FACIL, c'est d'offrir une vision et
d'informer de manière cohérente sur une longue période. Ensuite ce sera aux
gouvernements et à leurs légistateurs de faire la part des choses; ils sont
d'habitude heureux d'écouter les citoyens, surtout quand on les laisse
faire leur travail (enfin c'est ce qu'ils nous disent...).
> S'il y a conflit, le détenteur du brevet perd automatiquement. Point.
Il faut un effort considérable pour casser des brevets, c'est une spécialité
juridique. Prenons l'exemple du FAT de Microsoft; juste combattre ce brevet
trivial est une bataille épique qui coutera cher. Imagines alors la
difficulté des gouvernements de poursuivre Microsoft comme monopole...
> Tout n'est pas noir et blanc. Mais je suggère justement que les
> gouvernements engage des professionnels qualifiés et que des balises
> rigides soient mis en place pour évaluer une demande de brevet, et que
> ces balises restreignent passablement l'adoption de brevet au seul
> critère d'ingénieusité.
Il n'est pas tout de "suggérer". Et je ne crois pas que l'ingéniosité soit
le seul critère acceptable pour accorder un brevet; un spécialiste en
brevets pourrait nous l'expliquer. (quelqu'un en connait un?)
> Avoues que 5 ans se rapproche de ton idéal de l'abolition?
Rendu là, à quoi servirait les brevets? Au prix où ils coûtent et la
manière sont ils s'appliquent, 5 ans ne serait pas assez pour être
rentable.
> Par la suite, la société pourrait décider si les brevets devraient être
> abolis ou si la durée doit être augmentée pour encourager l'innovation.
L'augmentation de la durée des brevets encouragerait l'innovation?? Les
brevets assure la durée des monopoles, c'est leur seul but. Les compagnies
pharmaceutiques défendent leurs brevets parce que ça leur permet de
s'imposer plus longtemps sur le marché, pas pour financer leurs recherches
qui stagnent depuis une vingtaine d'années malgré des profits monstrueux.
Ce qu'elle veut cette société, c'est plus de liberté, donc plus de logiciels
libres et moins de brevets. Si on a quelque chose à essayer à ce stade-ci
de l'histoire, c'est plutôt un monde sans brevets; les pays infestés par le
SIDA nous en seraient très reconnaissants. Évidemment, quel industriel se
préoccupperait de la reconnaissance des pays pauvres qu'il exploite pour
s'enrichir, à part Bill et sa fondation? La preuve que le ridicule ne tue
pas... C'est pourquoi il faut promouvoir ici les logiciels libres, de
manière à ce qu'une majorité conscientisée finisse par renverser la vapeur.
> Je propose une approche étapiste.
Les étapes, elles arriveront si on les provoque. Si FACIL "niaise avec le
puck", rien ne permettra de croire qu'une première étape puisse arriver.
FACIL sera contre les brevets logiciels, comme tous les organismes de
promotion des logiciels libres. Être "créatif" sur ce point est inutile.
> Un gouvernement pourrait juger si un brevet est abusif. Je suggère que
> l'on pousse les gouvernements à être pro-actif. Et n'oublie pas, c'est
> dans le contexte ou les brevets ne serait qu'accordés lorsqu'ils
> présentent une idée ingénieuse, donc par conséquent le nombre de brevets
> accordés serait divisés par 10, un nombre plus facile à suivre.
Ça coûterait trop cher de demander aux gouvernements (et donc aux
contribuables) de faire la police des brevets, et c'est pourquoi les lois
canadiennes sont généralement plus tolérantes que les lois américaines.
Chez nos voisins du sud, tout est privatisé.
Une boutade: les brevets logiciels illimités vont simplifier la gouvernance
du monde, parce que lorsque toutes les connaissances et les idées seront
attribuées à leur propriétaires, on vivra dans le meilleur des mondes...
- --
Marc
"Rêver, c'est informer l'avenir." (Gérald Neveu)
-----BEGIN PGP SIGNATURE-----
Version: GnuPG v1.2.4 (GNU/Linux)
iD8DBQFAqD5QO0wEhhj/XXURAp4FAJ4rvU/mX8yvb0uW2ftzg7d2ktda4QCgn6EP
EBuexxkSL7+wB2DBF+lScmQ=
=D1uu
-----END PGP SIGNATURE-----
Plus d'informations sur la liste de diffusion forum